Résumé du domaine 1 : Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions

Par « langage », le programme de maternelle fait référence à l’ensemble des activités mises en œuvre par un individu lorsqu’il parle, écoute, réfléchit, essaie de comprendre et, progressivement, lit et écrit. L’appropriation du langage est conditionnée à sa stimulation, à son intensité et à sa qualité. L’enseignant et les autres adultes de l’école favorisent l’acquisition de la langue française en utilisant une langue parlée riche, et familiarisent progressivement avec l’écrit. Les activités proposées mobilisent donc simultanément tout au long du cycle ces deux composantes du langage, en relation duelle, en petits groupes ou en situation collective.

Les deux composantes du langage

La langue orale est utilisée dans les interactions, en production et en réception pour communiquer, comprendre, apprendre et réfléchir. Premier moyen de découvrir les caractéristiques de la langue française, elle permet aussi d’écouter d’autres langues parlées.
La langue écrite est lue par l’adulte, présentée et explicitée petit à petit jusqu’à ce que les enfants commencent à l’utiliser. C’est cette familiarisation progressive qui leur permet de découvrir les spécificités et les rôles de celle-ci (garder une trace, réfléchir, anticiper, s’adresser à un absent). On insiste sur la progression de tous les enfants tout au long du cycle. L’enseignant fait évoluer l’élève vers la compréhension et l’usage d’une langue française de plus en plus élaborée qui préparera au lire-écrire du cycle 2.

L’oral

Les interactions avec les pairs et les adultes permettent aux enfants, quelle que soit leur langue maternelle, d’acquérir une forme d’oral dès leur plus jeune âge. Sollicité et stimulé, l’enfant apprend à parler et comprendre : il nomme, explique, désigne ce qu’il fait, ce qu’il voit, imagine et ressent. L’enseignant, en lui posant des questions ouvertes, en le reprenant, en l’invitant à reformuler, l’amène à la découverte d’une langue orale riche, organisée, compréhensible. Cette mise en œuvre est rendue possible grâce à un enseignement structuré et régulier contribuant à l’apprentissage de la lecture au cycle 2.

Objectifs visés et éléments de progressivité

Oser entrer en communication

Il s’agit d’amener tous les élèves à pouvoir dire quelque chose, à s’exprimer, à formuler un avis ou un besoin, de leur permettre aussi de questionner et annoncer une nouvelle, de les amener à communiquer autrement que grâce à la communication non verbale. La communication des enfants s’allonge et se complexifie progressivement, de même que leurs prises de parole. Ils réalisent en grandissant qu’il est possible de mettre en mots les émotions et les ressentis. Tout au long de l’école maternelle, l’enseignant crée les conditions bienveillantes et sécurisantes pour que tous les enfants (même ceux qui ne s’expriment pas ou peu) prennent la parole. Toute erreur est « positive » car elle traduit une réorganisation mentale du langage. Les essais sont donc valorisés et une reformulation est proposée. Ainsi, l’enseignant contribue à construire l’équité entre les enfants en réduisant les écarts langagiers. 

Comprendre et apprendre

Les moments dits « de réception », où les enfants travaillent mentalement sans parler, sont des activités langagières à part entière que l’enseignant doit rechercher et encourager. Elles permettent de construire des outils cognitifs : reconnaître, rapprocher, catégoriser, contraster, se construire des images mentales à partir d’histoires fictives, relier des événements entendus ou vus dans des narrations ou des explications, dans des moments d’apprentissage structurés, traiter des mots renvoyant à l’espace, au temps, etc. Ces activités invisibles aux yeux de tout observateur sont néanmoins cruciales.

Échanger et réfléchir avec les autres

Les moments de production de langage à plusieurs sont fréquents et nombreux à l’école maternelle. Ces temps d’échange permettent la résolution de problèmes, les prises de décision collectives, la compréhension d’histoires entendues, etc. Il s’agit d’amener les élèves à découvrir l’argumentation, l’explication. Ils apprennent ainsi à poser des questions, et découvrent le point de vue des autres. L’enseignant commente alors l’activité qui se déroule pour en faire ressortir l’importance et la finalité.
L’école demande régulièrement aux élèves d’évoquer, c’est-à-dire de « parler de ce qui n’est pas présent ». Ces situations entraînent les élèves à mobiliser le langage pour se faire comprendre sans autre appui. Ce langage dit « d’évocation » offre un moyen de s’entraîner à s’exprimer de manière de plus en plus explicite.

Le rôle de l’enseignant est d’induire une prise de recul sur les propos tenus par les uns et les autres. Des activités de description sont également offertes en classe. Il s’agit d’inviter les élèves à décrire à l’oral un objet, une image ou une action, pour exercer les élèves à l’observation attentive et à l’enrichissement progressif du vocabulaire. Cette pratique de la description peut s’articuler autour des autres domaines. La réflexion invite aussi à l’installation d’une culture du respect de la nature, de l’environnement et de sa diversité (limitation et tri des déchets, plantations dans l’école, réalisations en arts plastiques, etc.).

Commencer à réfléchir sur la langue et acquérir une conscience phonologique

Enrichir le vocabulaire

Toutes les activités offertes en maternelle visent à augmenter le bagage lexical compris et utilisé par l’élève. Celui-ci est mobilisé et réutilisé lors de temps dédiés à l’enseignement de la langue. L’enseignant est attentif au choix des mots, à leur prononciation, à leur mise en réseau, à leur appartenance à toutes les catégories grammaticales. Il veille à la mémorisation et à l’utilisation du vocabulaire dans des phrases et des textes. L’apprentissage de la langue est rendu méthodique et couvre tous les domaines. 

Acquérir et développer la syntaxe

La syntaxe s’acquiert conjointement avec la construction du lexique. L’appropriation de celle-ci se fait petit à petit avec les activités de la classe, par la pratique de la langue orale et de la langue écrite, mais aussi lors de courtes activités dédiées. La production de phrases simples et courtes est favorisée dans un premier temps, pour se complexifier tout au long du cycle. L’enseignant emploie des structures de phrase qu’il veille à faire réutiliser en situation par ses élèves (forme négative, phrases de types interrogatif ou impératif, etc.), et ce en fonction du niveau de développement de chacun. C’est la répétition et l’emploi dans des contextes variés qui permettront d’assurer la mémorisation, l’utilisation des mots et des structures par chaque élève.

Acquérir et développer une conscience phonologique

Pour pouvoir lire et écrire, les enfants devront réaliser deux grandes acquisitions :

  • La conscience phonologique, c’est-à-dire la capacité à identifier les unités sonores,
  • Le principe alphabétique, c’est-à-dire la compréhension que l’écriture du français est un code au moyen duquel on transcrit des sons.

Lorsqu’ils apprennent à parler, les enfants reproduisent les mots, ils peuvent aussi jouer avec les sons de manière aléatoire. À l’école maternelle, ils apprennent donc :

  • à les manipuler volontairement,
  • à les identifier,
  • à les dissocier d’autres sons,
  • à repérer des ressemblances et des différences.

En effet, pour pouvoir s’intéresser aux syllabes et aux phonèmes, il faut que les enfants se détachent du sens des mots.
L’unité la plus aisément perceptible est la syllabe. Puis ils apprendront à repérer des éléments plus petits, en commençant par les sons-voyelles, plus aisés à percevoir que les sons-consonnes.
Pour développer la conscience phonologique, l’enseignant habitue les enfants à décomposer ce qu’ils entendent en syllabes orales, en utilisant le frappé d’une suite sonore, de mots connus. Ensemble, ils distinguent une syllabe identique dans des mots à deux syllabes, puis en intervertissant des syllabes, toujours sans support matériel, ni écrit, ni imagé. Ces jeux phoniques peuvent être pratiqués en grand groupe, mais l’enseignant privilégie les petits groupes pour s’assurer de la participation de tous.

Ainsi, dès la petite section, les enfants sont amenés à une écoute active au travers de jeux sonores (jeux vocaux, comptines chantées, formulettes, chansons, petits poèmes, textes courts, etc.) qui stimulent leur curiosité et leur attention à l’univers des sons.
À partir de la moyenne section, l’enseignant régularise ces jeux de sensibilisation. En grande section, ces activités deviennent régulières et fréquentes, avec une attention particulière portée aux enfants pour lesquels l’enseignant ne repère pas d’évolution dans les essais d’écriture. Pour ceux qui en sont capables, des activités similaires peuvent être amorcées sur des sons-voyelles et quelques sons-consonnes. 

Éveiller à la diversité linguistique

À l’école maternelle, ils découvrent l’existence d’autres langues, parfois très différentes de celles qu’ils connaissent. Tout d’abord, dans des situations ludiques (jeux, comptines), ils prennent conscience que la communication peut être réalisée en utilisant les langues régionales, les langues étrangères et la langue des signes française. Les ambitions sont modestes, mais les essais que les enfants sont amenés à réaliser, notamment pour répéter certains éléments, doivent être conduits avec une certaine rigueur.
On parle d’un éveil à la diversité linguistique fondant une étape initiale qui se poursuivra tout au long de la scolarité. Une valorisation de la langue d’origine des enfants multilingues ou non francophones doit être effectuée. C’est une occasion d’éveiller tous les élèves à la diversité linguistique et de leur faire découvrir très tôt que le multilinguisme est une richesse. 
L’éveil à la diversité linguistique contribue au développement de la conscience phonologique et du langage oral, mais aussi à la consolidation de la maîtrise du français et à l’ensemble des objectifs de l’école maternelle. Il offre aussi une place à la sensibilité, à la sensorialité, aux compétences motrices, relationnelles et cognitives des élèves.

L’écrit

Objectifs visés et éléments de progressivité

Écouter de l’écrit et comprendre

L’enjeu est d’habituer les élèves à la réception de langage écrit de la langue française afin d’en comprendre le contenu. L’enseignant conduit ainsi un travail spécifique pour guider la compréhension. Il prend en charge la lecture de messages, de textes variés, en orientant et en animant les échanges qui suivent l’écoute. Les textes lus par l’enseignant deviennent progressivement de plus en plus longs et éloignés de l’oral. Ils permettent aux élèves « d’entendre du langage écrit », de développer leur capacité à écouter, à se représenter une situation. La littérature de jeunesse occupe une grande place, avec les récits, les contes, les textes poétiques, mais d’autres types d’écrits comme les consignes, les textes injonctifs (type recette de cuisine, règle de jeu, etc.) et les textes documentaires ne sont pas à exclure.

Découvrir la fonction de l’écrit

L’objectif est de permettre aux enfants de comprendre que les signes écrits qu’ils perçoivent valent du langage. L’écrit donne alors accès à la parole de quelqu’un. En production, il permet de s’adresser à un absent ou de garder pour soi une trace afin de ne pas oublier. Les élèves prennent alors conscience que l’écrit transmet, donne ou rappelle des informations et permet d’imaginer. À l’école maternelle, les enfants découvrent la fonction de l’écrit en utilisant divers supports (livres, affiches, lettres, courriels, étiquettes, etc.). Les écrits réalisés sont en relation avec des situations, des projets. Les élèves découvrent aussi l’impact de celui-ci. En effet, quand ils sont spectateurs d’une écriture qui leur est adressée, ils constatent les effets qu’elle produit sur ceux recevant une trace écrite. 

Commencer à produire des écrits et en découvrir le fonctionnement

C’est l’enseignant qui juge du moment où les enfants sont prêts à commencer une partie des activités que les adultes mènent avec l’écrit. Cette prise en charge partielle se fait en production et largement avec l’aide d’un adulte. Toute production d’écrits nécessite différentes étapes, et donc du temps, avant d’aboutir. L’enfant doit prendre conscience qu’on n’écrit pas comme on parle, et que le passage à l’écrit nécessite des transformations. La technique de dictée à l’adulte concerne l’une de ces étapes qui est la phase de la rédaction proprement dite. D’autres premières expériences comme les essais d’écriture (ou écritures spontanées) des élèves peuvent être l’occasion d’une amélioration et contribuent aussi à une prise de conscience du pouvoir que donne la maîtrise de l’écrit.

Découvrir le principe alphabétique

Comme nous l’avons vu plus haut, la découverte du principe alphabétique est une condition pour apprendre à lire et à écrire. Durant les trois années de l’école maternelle, les enfants vont découvrir celui-ci en apprenant la relation entre lettres et sons. Ce qui est visé est la découverte de ce principe et non l’apprentissage systématique et complet des relations entre formes orales et écrites.
En maternelle, les enfants sont d’abord amenés à comprendre comment une parole peut être transformée en écrit, d’où l’importance du lien entre langue orale et langue écrite. Le chemin inverse, de l’écrit vers l’oral, sera pratiqué plus tard quand les enfants commenceront à apprendre à lire. Cette activité d’écriture ne peut s’effectuer qu’en parallèle du développement de la conscience phonologique.
La découverte du principe alphabétique rend possible les premières écritures autonomes en fin d’école maternelle parce qu’elle est associée à des savoirs complexes et à de nouveaux savoir-faire :

  • la découverte de la fonction de l’écrit et les productions avec l’aide d’un adulte
  • la manipulation d’unités sonores (syllabes et phonèmes) 
  • l’initiation aux tracés de l’écriture (dès la moyenne section)
  • la découverte des correspondances entre les trois écritures (cursives, script, capitales)

L’écriture autonome constitue donc l’aboutissement de ces différents apprentissages et découvertes.

Commencer à écrire tout seul

Avant de commencer à écrire seul, nous avons vu qu’une série de compétences sont requises.

Un autre préalable est l’entraînement du geste moteur. En effet, il faut aux enfants plusieurs années pour acquérir les habiletés nécessaires à l’écriture manuscrite, et les exercices graphiques permettent de travailler sur ces habilités. Ils devront apprendre à utiliser leur regard pour piloter leur main, utiliser de façon coordonnée les quatre articulations qui servent à tenir et guider l’instrument d’écriture (épaule, coude, poignet, doigts), contrôler les tracés, et surtout tracer volontairement des signes abstraits dont ils comprennent qu’il ne s’agit pas de dessins mais de lettres, un code pour transcrire des sons. Les deux pratiques que sont l’écriture et les exercices graphiques sont deux choses différentes, qui ne doivent pas être confondues.

En petite section, on habitue les enfants à contrôler et guider leurs gestes par le regard, on les entraîne à maîtriser leurs gestes moteurs, à prendre des repères dans l’espace de la feuille.
En moyenne et grande sections, on leur demande de s’exercer régulièrement à des tâches de motricité fine qui préparent spécifiquement à l’écriture.

Une vigilance particulière est accordée aux gestes propres à l’écriture et à l’apprentissage d’une posture confortable, à la bonne tenue de l’instrument d’écriture, à la gestion de l’espace graphique (aller de gauche à droite, maintenir un alignement, etc.). L’enseignant montre et offre des modèles variés.  

Lorsque l’écriture en capitales est pratiquée par les enfants, l’enseignant veille au respect de l’ordre des lettres et met en évidence les conséquences du respect ou non de cet ordre. L’écriture cursive nécessite quant à elle un entraînement pour apprendre à tracer chaque lettre et l’enchaînement de plusieurs lettres, en ne levant qu’à bon escient l’instrument. L’entraînement commencé en moyenne section est conforté en seconde partie de grande section, et devra être systématiquement continué en CP.

À partir de la moyenne section, l’enseignant associe le nom de la lettre, son tracé et sa valeur sonore, et donne à voir la correspondance des trois écritures (cursives, script, capitales). Ainsi, les enfants s’exercent à des transcriptions de mots, de phrases, de courts textes connus, et à leur saisie sur ordinateur. Par binôme idéalement, un enfant nomme la lettre, l’autre la cherche sur le clavier puis la tape.
L’objectif étant de construire la valeur symbolique des lettres, l’enseignant veille à ne jamais isoler les trois composantes de l’écriture :

  • le sens de ce qui est écrit (composante sémantique),
  • le code alphabétique (composante symbolique),
  • la dextérité graphique (composante motrice).

Les essais d’écriture de mots

Il s’agit de valoriser publiquement les premiers tracés (lignes, signes divers ou pseudo-lettres) des petits qui disent « avoir écrit quelque chose ». Il s’agit d’amener toute la classe sur le chemin du symbolique. Dès la moyenne section, l’enseignant fait des commandes d’écriture de mots simples, par exemple le nom d’un personnage d’une histoire. Le but est que les enfants se saisissent des apports de l’enseignant qui a écrit devant eux, ou des documents affichés dans la classe, préalablement observés et commentés.

Une fois les tracés terminés, l’enseignant lit, ou bruite ou dit qu’il ne peut pas encore lire. Il discute avec les élèves, valorise leurs essais, mais ne leur laisse pas croire que leurs productions sont correctes si ce n’est pas le cas. Il accompagne, en faisant par exemple correspondre unités sonores et graphèmes lorsqu’il relit avec l’élève. Il peut aussi leur faire recopier la forme normée, et termine si besoin par son écriture d’adulte sous l’essai de l’élève.

Les premières productions autonomes d’écrits

Après que les enfants ont compris que l’écrit est un code,  il est possible de les inciter à produire des messages écrits. En grande section, les enfants commencent à avoir les ressources pour écrire, et sont encouragés en ce sens. Ils peuvent chercher des exemples dans des textes connus, utiliser le principe alphabétique, demander de l’aide. Plus ils écrivent, plus ils ont envie d’écrire.

L’enseignant accepte qu’ils mêlent écriture en capitales et en cursives pour résoudre des problèmes phonographiques. Après la recopie des mots qu’ils connaissent, ils veulent écrire de nouveaux mots, et sont encouragés à recourir à différentes stratégies (en les combinant ou non, en utilisant la lettre K par exemple pour transcrire le son /ca/ etc.). La séparation entre les mots reste un problème difficile à résoudre jusqu’en fin de cycle 2.

Enfin, l’enseignant s’attache à toujours commenter les productions avec les élèves (ce qu’ils voulaient dire, ce qu’ils ont écrit), ce retour montre qu’ils ont déjà des savoirs sur les textes écrits. Enfin, comme pour les essais d’écriture de mots, l’enseignant écrit en français écrit normé en soulignant les différences.
Il donne aussi aux enfants les moyens de s’entraîner, notamment avec de la copie, dans un coin écriture aménagé spécialement (outils, feuilles blanches et à lignes, ordinateur et imprimante, tablette numérique et stylets, tableaux de correspondance des graphies, textes connus, etc.). Un recueil individuel de ces premières écritures peut devenir un dossier de référence pour chaque élève pendant tout le cycle et pourra être apporté pour leur rentrée au CP.

Découvrez le résumé du domaine 2.